Pôvre «Tiger»!

On dit que le taux de testostérone d’une personne augmente à la suite d’une confrontation dont elle sort gagnante.
J’imagine qu’un vainqueur à répétition sécrétera de plus en plus de potion magique et s’installera de plus en plus gagnant, consacré, winner irrésistible et célébré.

Dans la nature, cette régulation du taux de testostérone sert probablement à inciter les mâles dominants à se reproduire le plus souvent et largement possible; plus ils auront de victoires et de testostérone, plus leur succès auprès des femelles devrait être grand. La survie même de l’espèce est en jeu.

Pensez maintenant à ce pôvre Tiger se hissant de victoire en victoire à force de bras et que la nature semble avoir piégé. On l’accuse d’avoir succombé alors qu’on pourrait dire qu’il a répondu avec beaucoup d’allant à l’appel de l’espèce. Avec le niveau de testostérone que j’imagine être le sien c’était son destin, presque son devoir contradictoire de faire sa part : car il confronte à répétition, c’est son métier; il gagne, c’est sa spécialité; il sécrète donc et suinte la testostérone à pleins godets. Comment lui résister (à lui, et lui à sa testostérone) ?

Dans un monde idéal, nous pourrions célébrer à la fois ses victoires et son comportement. Mais non. Notre monde est imparfait et on le réprouve. On rengaine mièvrement qu’avec la réussite et le pouvoir viennent les tentations et les occasions prochaines de péché. En fait, nous devrions plutôt dire qu’avec la victoire se lèvent et se renforcent les pulsions et que, probablement, plus on est puissant (terme qu’on utilise tant pour la chose publique que pour le sexe. Interesting…), plus ça doit pulser fort et plus la gent féminine doit fourmiller autour du héros. Nos angoisses face à la pérennité de l’espèce devraient en être apaisées.  Mais on s’obstine à dire que la nature est faible alors que c’est manifestement le contraire que l’on vit.

Lui, Tiger, l’imbattable, celui qu’on veut toujours voir gagner, on lui reproche d’avoir suivi sa nature de mâle dominant. Moi, ce que je lui reproche c’est d’avoir fait beaucoup de peine à sa femme et à ses enfants. Et aussi, paradoxalement, de ne pas (aux dernières nouvelles) avoir vraiment suivi la pulsion jusqu’au bout, de l’avoir pervertie en ne semant pas ses gamètes aux quatre vents pour le plus grand bien de l’humanité. À ce que l’on sache, il n’y a pas une armée de Tiger Cubs au fourneau. Ça, c’est la vraie perversion de notre nature, le véritable refus de ses responsabilités.

En guise de réparation pour son manquement face à l’espèce, je suggère que Tiger fasse du bénévolat de donneur pour une clinique de fertilité. Son honneur de winner serait sauf, la pérennité de l’espèce assurée et sa famille réconciliée par son sens du devoir retrouvé. À moins qu’il ne développe une inflammation du tunnel carpien.

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